C’est un invité prestigieux que le Conseil des Relations Internationales de Montréal (CORIM) avait invité à Montréal le 21 septembre dernier pour un déjeuner-conférence. L’ancien président de la République française, François Hollande, est venu « en tant qu’auteur », partager sa vision du monde devant 400 personnes à l’hôtel Fairmont Le Reine-Elizabeth.
C’est « en tant qu’auteur » que l’ancien chef de l’État Français est venu s’exprimer à Montréal, à l’occasion de la sortie de son nouveau livre (Les leçons du pouvoir, aux Éditions Stock). S’il a refusé de discuter la politique française actuelle, c’est bien le 5ème Président de la République française qu’étaient venues voir les 400 personnes présentes.
Une parole sage, consensuelle et consciente
Comme on accueille un professeur d’université émérite, François Hollande donnait un commentaire des tendances géopolitiques, rappelant des principes qu’on lui savait chers avant son accession à la présidence française. À travers sa vision universaliste et largement axée sur les droits humains, il évoque les dysfonctionnements du monde et livre une parole se voulant sage, consensuelle et consciente. C’est au nom de « valeurs communes » entre le Québec et la France qu’Hollande tenait à venir à Montréal.
Dans la discussion menée par Loïc Tassé, Hollande décrit le monde des 18 derniers mois comme marqué par deux « mouvements profonds » : le désordre et la division. Un désordre causé par des guerres, le terrorisme – interne et externe – mais également un désordre climatique qui « année après année produit catastrophes et bouleversements. »
La démocratie est aujourd’hui en cause
François Hollande se pose comme observateur, et décrit également le désordre politique, celui des élections dans les démocraties, « car les élections, souvent, se produisent dans des démocraties. » Il critique la remise en question d’accords bilatéraux capitaux (de Paris sur le climat, ou sur le nucléaire iranien) ou d’institutions majeures (ONU, OTAN, OMC…) comme causes d’instabilité du monde actuel.« Je crois que plus que jamais dans nos démocraties, il faut parler de LA démocratie. C’est elle qui est aujourd’hui en cause. », insiste l’ancien chef de l’Etat.
Les conséquences de ces divisions et désordres selon lui sont l’incompréhension des peuples, et une crise des démocraties occidentales. Cette crise profiterait aux puissances « extra-occidentales » telles la Chine ou la Russie, mais également à des puissances « animées par des causes religieuses voulant peser sur notre destin » – l’Arabie Saoudite, l’Iran, la Turquie.« Si les démocrates ne s’unissent pas, alors il y a un risque. », prévient.
Le danger du populisme
C’est finalement une crise identitaire que décrit Hollande : les pays entre populisme et démocratie, enjeux nationaux et internationaux, valeurs et principes, universel et local. Le lien est rapide entre les divisions au sein des états, la montée du terrorisme et du populisme, les questions d’immigration, ainsi que la place de l’Europe.
« Il faut montrer aux populistes quelles sont les conséquences de leur discours. », assène-t-il.
Parce que si d’après François Hollande, l’Europe était à l’origine le désir d’un espace commun, il questionne sa survie alors que ses fondements mêmes sont remis en cause – vis-à-vis l’accueil d’immigrés, les politiques de frontières des pays de l’Est. « L’Europe s’est plus divisée sous ma présidence sur la question de l’immigration que sur la question de la zone euro. » Il ajoute qu’on « ne peut pas, quand on a pendant longtemps été opprimé, refuser toute solidarité et ne voir en l’Europe qu’un marché. » Il insiste sur la nécessité de rassurer en montrant qu’il est possible de contrôler l’immigration, et qu’une volonté existe de créer une défense européenne – Angela Merkel s’engageait en Juin passé en ce sens aux côtés d’Emmanuel Macron.
Trump et les Américains
La relation entre les tensions qu’il décrit et leurs conséquences économiques est par ailleurs très importante, souligne-t-il. « Ce que fait Trump n’est pas seulement mauvais pour l’image des Américains, mais également pour les Américains eux-mêmes. »
Interrogé sur la limite entre valeurs démocratiques et intérêts de l’état – pourquoi la France est en si bon terme avec l’Arabie Saoudite, régime « d’apartheid des femmes » -, Hollande invoque des conséquences économiques et politiques. Néfastes en cas de refus de commercer avec de tels pays, et stratégiques pour la lutte anti-terroriste.
C’est finalement autour des principes de démocratie et d’unité que le discours d’Hollande a raisonné vendredi passé. Expliquant parfois des faits de son mandat – confirmant l’information de Media Part sur les rafales en Inde, expliquant le devoir de solidarité ayant mené l’armée française au Mali – François Hollande a tenu un discours engagé et teinté d’un sentiment de mouvement, d’action.
Monsieur Hollande sera-t-il candidat aux élections 2022? À la question « à quoi rêvez-vous, » il répond « à quel gouvernement je rêverais, c’est ça »? C’est là la seule information qu’il donnera, sans y répondre…