Le Premier ministre canadien a achevé sa tournée en France à Paris, au sommet GovTech 2018, où il a réaffirmé sa vision libérale et pro « startup » de l’économie.
Par Jacques Simon, journaliste
Après deux jours sous le signe du deuil et de la commémoration, Justin Trudeau a fini sa tournée française sur une note plus légère. En effet, le Premier ministre canadien était la tête d’affiche du sommet GovTech 2018 qui avait lieu à l’Hôtel de ville de Paris ce lundi 12 novembre, lendemain du centenaire de l’armistice de la Grande guerre. Cravate verte et chaussette bleues à pois, il est arrivé triomphant dans une salle comble et conquise d’avance par son discours jeune, libéral et pro-entrepreneur.
L’antre du libéralisme et des Start-up
Parmi les personnalités conviées à ce sommet, surtout des créateurs de startups—arborant tous un badge jaune pour être identifiables entre eux—mais aussi beaucoup de politiques, jeunes pour la plupart, porteurs de discours technophiles. Justin Trudeau, donc, mais aussi Anne Hidalgo, maire de Paris, Gérald Darmanin, Ministre de l’Action et des Comptes publics, Mounir Mahjoubi, Secrétaire d’État auprès du Ministre de l’Économie et des Finances ou encore Paula Forteza, députée de la deuxième circonscription des Français de l’Étranger (Amérique latine et Caraïbes). Un panel donc largement issu de la majorité gouvernementale et dont la présence du Premier ministre canadien vient souligner la proximité idéologique entre les gouvernements français et canadiens déjà mainte fois remarquée.
« Vous avez été décrit comme le geek-en-chef » a commencé Daniel Korski, président du sommet, lorsque Trudeau est monté sur scène. « Si vous êtes le geek-en-chef, Monsieur le Premier Ministre, nous sommes votre armée », a t-il affirmé, comme pour souligner que le public était d’office acquis à la cause du chef du gouvernement canadien. Et pour cause : Trudeau a passé une demie heure à caresser son public dans le sens du poil, ne cessant de lui rappeler que le futur lui appartenait.
La startup à l’appui du politique
« Le gouvernement devrait être bon à livrer des services, devrait être utile dans la vie de notre société », a expliqué en français le Premier ministre canadien. Or, « la numérisation permet justement de livrer des services en ligne, de communiquer avec les citoyens, […] pour permettre au gouvernement d’être meilleur dans ce qu’il fait ». Ces nouvelles technologies sont donc autant d’outils pour les institutions publiques qui veulent affiner et améliorer leur action.
Même analyse pour Paula Forteza (deuxième circonscription des Français de l’étranger—Amérique latine et Caraïbes) qui a participé à un débat sur la CivicTech définie, de manière assez libérale, comme étant toutes les technologies développées dans l’intérêt public. « En étant tellement éloignée de mes électeurs, […] j’ai dû mettre en place des plateformes et des initiatives en ligne pour communiquer avec eux », a-t-elle expliqué à L’Outarde, avant d’ajouter que « le numérique, surtout pour les Français de l’étranger, est un outil crucial ».
Attentions aux excès et aux dérives
De nouveaux outils, mais qui n’annulent pas forcément les anciens défis. « Les applications mobiles ne changent rien en termes des vraies conversations qu’il faut avoir avec les citoyens », a affirmé Trudeau en se remémorant sa campagne électorale victorieuse de 2015; « nous devons continuer à nous assurer d’interagir physiquement avec les gens ». D’ailleurs, pour l’instant, ces efforts n’ont pas été fait de manière concluante. « Nous devons faire mieux que ce qui a été fait » a affirmé Forteza, rappelant que 60% des utilisateurs de Facebook n’ont pas confiance en le réseau social.
À un niveau plus général, difficile aussi de ne pas se rendre à l’évidence que les avancées technologiques ont aussi été une épine dans le pied des démocratie libérales. À l’heure des fake news et de l’autoritarisme renaissant, on ne peut guère oublier que « certaines personnes utilisent la technologie pour miner la démocratie et créer des divisions et des controverses », comme l’explique Trudeau. Si les startupers ont donc, pour le Premier ministre canadien, le futur qui leur appartient, il n’occulte pas les défis qui vont se présenter : « il est plus facile de pousser quelqu’un à être fâché que de le pousser à être positif ».