André Poulin est très amer. La fin du financement de la France et du Québec sonne peut-être le glas de l’association Québec-France (AQF) qu’il préside depuis 2012. Le président est même persuadé qu’il y a une action concertée pour faire mourir l’organisation. Le consulat de France quant à lui, dit soutenir des projets porteurs pour l’avenir. « C’est comme si le gouvernement français ne croyait pas à cette relation citoyenne », s’exclame André Poulin. Le Consulat de France à Québec a en effet annoncé qu’il ne financerait pratiquement aucun des projets présentés par l’AQF à la commission permanente de coopération franco-québécoise, à l’exception du Prix littéraire Marie-Claire Blais, pour un montant de 2 000$. « C’est pour se donner bonne conscience », lâche le président Poulin. L’AQF existe depuis 44 ans, et sa dissolution pourrait être décidée lors de l’assemblée générale du 20 juin prochain. Pour l’heure, l’AQF a cessé toutes dépenses, et mobilise ses appuis. André Poulin doit rencontrer prochainement Jean-Paul Lallier, l’ancien maire de Québec. Le 29 avril dernier, le président de l’AQF a rencontré Christine St-Pierre, ministre des Relations internationales et de la Francophonie (MRIF). Selon lui, la ministre a semblé « ébranlée » par la décision de la France. Le MRIF n’a pas retourné nos appels pour vérifier cette information. Pourtant le Québec a décidé lui aussi de cesser de subventionner l’AQF. En effet, le gouvernement du Québec aide déjà l’association française France-Québec, et ne veut pas suppléer au « défaut de paiement » du gouvernement français. Jusqu’alors, l’AQF recevait 100 000$ du gouvernement du Québec pour payer un directeur général et des frais de secrétariat, ainsi que 60 000$ pour payer le loyer de la Maison Fornel sur la Place Royale de Québec. Le gouvernement français versait 32 000$ et payait une partie des indemnités des deux stagiaires français. Selon André Poulin, c’est une action concertée, car l’Office Franco-Québécois pour la Jeunesse (OFQJ), qui aidait l’AQF, a lui aussi décidé de cesser tout financement cette année, au motif que les billets d’avion payés à 65% par l’office à des jeunes en stage estival, ne concernent pas des stages de formation. Le président de l’AQF est persuadé qu’il paie la soi-disant dégradation des relations franco-québécoises, notamment à cause du triplement des frais de scolarité des étudiants français. Quant à l’association « sœur » France-Québec, elle subit une baisse de 33% de ses subventions. « On voit bien qu’on veut éteindre la flamme! », lance le président. Le président de l’association française, Marc Martin, commentait cette décision la semaine dernière : « Le réseau des associations France-Québec et Québec-France a été créé par une volonté politique de part et d’autre. Côté français, la création de France-Québec a même été portée par des diplomates du Quai d’Orsay. L’oublierait-on aujourd’hui? » Le consulat de France veut soutenir les initiatives et les projets porteurs pour l’avenir [caption id="attachment_10835" align="alignleft" width="225"] Le Consul général de France à Québec, Nicolas Chibaeff (Crédit photo : Nathalie Simon-Clerc)[/caption] Du côté du Consulat de France au Québec, on réfute ces allégations. « La relation France – Québec se porte bien et les deux gouvernements partagent la même volonté, afin d’entretenir son dynamisme, de soutenir les initiatives et les projets porteurs pour son avenir. », maintient Nicolas Chibaeff, Consul général de France à Québec. Le diplomate explique son souci de bien gérer les crédits publics, et de soutenir les projets les plus pertinents au regard des priorités définies par les deux gouvernements. Il rappelle également que les contraintes budgétaires excluent toute subvention de fonctionnement « d’une association ou de tout autre organisme, quels que soient leurs mérites et leur respectabilité. » Alors qu’André Poulin regrette d’avoir été mis devant le fait accompli, et de ne pas avoir été invité à la commission permanente pour défendre ses projets, Nicolas Chibaeff assure que « ces principes avaient été clairement exposés à la direction de Québec – France, (…) en amont de la préparation des budgets à l’automne dernier. » Le diplomate soutient que « la Commission permanente de coopération franco-québécoise a dû arbitrer entre de nombreux projets concurrents de grande qualité », et qu’elle a néanmoins retenu deux projets de l’AQF : le Prix littéraire Marie-Claire Blais, décerné dans le cadre du Salon international du livre de Québec, et une aide destinée à assurer la faisabilité d’un projet d’échange de jeunes accueillis par des municipalités. Le Consul de France se tourne résolument vers l’avenir : « Nul ne conteste la valeur de l’engagement de l’Association Québec – France, ni le rôle que celle-ci a joué pendant plusieurs décennies, nul ne doit non plus douter du souci qui anime les pouvoirs publics français et québécois de travailler au plus près des acteurs les plus dynamiques de la société civile, et de tout faire pour assurer l’avenir d’une relation qui restera exceptionnelle pour les générations du 21e siècle. » (crédit photo : La Maison Fornel – Wikimédia Commons)]]>