Plus que quelques jours pour visiter l’exposition Love is Love du couturier français Jean Paul Gaultier au Musée des Beaux-Arts de Montréal. Notre chroniqueuse « Mode et Design », Sylvie Colombier, revient sur cette exposition exceptionnelle.
Jean Paul Gaultier souligne ses 20 ans de Haute-Couture avec l’exposition « Love is Love, Le mariage selon Jean Paul Gaultier », en collaboration et en exclusivité avec le Musée des Beaux-Arts de Montréal, Nathalie Bondil, directrice générale et conservatrice en chef du MBAM et Thierry-Maxime Loriot, commissaire de l’exposition, jusqu’au 22 octobre 2017.
Avec la rétrospective de toutes ses robes de mariée, Jean-Paul Gaultier nous offre le plaisir de contempler des oeuvres d’art spectaculaires. Toutes ces robes ont été façonnées par de nombreuses petites mains issues de l’excellence des métiers d’art français, comme le brodeur, le plisseur, le plumassier, la dentelière, la tricoteuse et nombre d’autres.
Le couturier est un défenseur de la diversité des genres, des races et des orientations sexuelles, aussi souhaite-t-il transmettre ses messages en bousculant le mariage traditionnel et en faisant voler en éclats certains tabous. La robe blanche, must des mariées depuis 1840, devient une valeur symbolique qui perdure dans le nouveau millénaire et qui s’adapte à l’évolution des mentalités et des moeurs.
Depuis 1976, « l’enfant terrible de la mode » n’a eu de cesse d’oser, de choquer à travers ses créations insolites et exceptionnelles, et prône la diversité des couples hétérosexuels, homosexuels, interculturels et inter-raciaux : En 2001, le mannequin Jade Parfitt défile, telle une vierge à l’enfant, dans une robe bustier en crêpe de soie royal et organza, avec un enfant noir dans ses bras.
Collection les Cutters « La Mariée » Haute Couture printemps-été 2001
« Love is Love », est un titre en hommage au discours prononcé par Barack Obama le 26 juin 2015. Ce discours légalisant le mariage homosexuel dans tous les états américains est une petite révolution, dix ans après le Canada, deux ans après la France.
Il faut noter que dès 2005, Jean Paul Gaultier ose faire défiler Tanel, sa muse, à côté de son « mari ».
Collection Le Mariage Homosexuel « Les Mariés » prêt-à-porter printemps-été 2005
En 2011, la mariée est un homme, mannequin androgyne, qui trois ans plus tard se fera faire une opération de ré-attribution sexuelle. Le costume pour homme est en tulle de soie plissé «Toutes directions».
Collection Punk Cancan « Joy Division » Haute Couture printemps-été 2011
La même année, la Québécoise Eve Salvail dont le crâne est rasé et tatoué d’un dragon, défile en mariée, portant une robe corset 3D en drapés « Alix » de jersey ivoire.
Collection Black Swan « Cygne blanc » Haute Couture automne-hiver 2011/2012
Cinq ans plus tard, dans le tumulte des immigrations massives sur tout le continent, le couturier met en scène l’union de plusieurs continents avec une mariée portant une robe symbolisant cette intégration. La mariée porte une robe avec un tablier baleiné en velours dévoré « fougère » et un body en tulle illusion. Celui-ci est incrusté de dentelles à motifs, crochetées à des peaux de gazelle ciselées et agrémentées de plumes d’aigrette re-brodées de cristaux Swarovski. La coiffe est une réplique de la célèbre coiffe en dentelle des Bigouden (Bretagne) faite de longs cheveux auburn bouclés, et fixée par un ruban sous l’oreille. Il est important de noter que 484 heures de travail ont permis de réaliser cette tenue spectaculaire.
Collection Paris-Brest « La Mariée » Haute Couture automne-hiver 2015-2016
Jean Paul Gaultier est tout à la fois, un artiste, un artisan, un constructeur, un bâtisseur de cathédrales. Il joue, renoue et déjoue avec les codes, il veut faire rompre les chaines des tabous. Il souhaite montrer que l’impossible peut devenir possible, que la différence de l’autre existe et qu’elle se doit d’être respectée et acceptée. Que justement, c’est cette diversité qui fait le monde et que chacune et chacun peut trouver sa place dans un monde qu’il voudrait amoureux et harmonieux.