Le 24 janvier dernier, le mouvement montréalais En Marche d’Émmanuel Macron organisait sa première conférence à l’Université de Montréal sur le thème « réenchanter l’Europe ». Ils étaient nombreux, près d’une centaine, venus célébrer les 30 ans d’Erasmus et les 60 ans du traité de Rome. Deux intervenants pro-Europe animaient les débats: Marie Bernard-Meunier, ancienne ambassadrice du Canada en Allemagne et aux Pays Bas et Georges Ross, chercheur au CERIUM et professeur associé à la Chaire Jean-Monnet de l’Université de Montréal.
Par Cédrelle Eymard
L’Europe, chère à Macron, au cœur du débat
« Le premier engagement d’Emmanuel Macron, c’est l’Europe », a déclaré Christopher Weissberg, co-référant du mouvement, en ouverture de l’évènement. La conférence était bel et bien un hymne, non pas à la joie, mais à l’Europe. Après la projection d’un petit film de dix minutes sur les trente ans d’Erasmus, dans lequel des étudiants anciens et actuels du programme, exprimaient leur lien avec l’Europe, Marie Bernard-Meunier a tenté de répondre à la question: Pourquoi l’Europe va mal? Selon l’ancienne ambassadrice, trois grands facteurs sont en cause: le moteur franco-allemand lui aussi va mal, la politique communautaire de chacun des pays membres, plus occupés à défendre leurs intérêts qu’à construire ceux de l’Europe et la résurgence des nationalismes et populismes européens.
« Il faut à l’Europe l’envie de construire l’Europe et non la défense de chacun de ses membres. A chaque rassemblement européen, les dirigeants expriment leur joie de n’avoir rien lâché à l’Europe, c’est une grave erreur. », se désole-t-elle. En outre, l’Europe ne possède plus depuis longtemps des dirigeants politiques forts et incarnant l’Europe.
La Grande-Bretagne sabote l’Europe depuis longtemps
Le cas de la Grande Bretagne n’est, selon elle, pas une grande surprise. « Le Brexit n’est que le résultat d’un long renoncement à l’Europe que cultive la Grande Bretagne depuis des années. Ils sabotent l’Europe depuis longtemps! ». L’Europe a toujours préféré intégrer toujours plus de membres plutôt que construire. Marie Bernard-Meunier établit un constat implacable : « L’Europe a toujours fait ce qui était possible et non ce qui était souhaitable ».
Georges Ross, pour sa part, a recentré le débat sur le Brexit et l’élection présidentielle américaine, et l’effet de ses deux récents évènements sur l’Europe. Il affirme que les futures élections présidentielle et législatives, en France mais aussi aux Pays Bas, vont donner le ton à l’Europe de 2017.
Des participants qui « se rapprochent d’Émmanuel Macron »
Peu d’euro-sceptiques s’étaient déplacés pour cette conférence. Un participant a lancé: « Nous voulons une autre Europe ! Celle-ci ne nous convient pas. On ne décide rien. L’Europe écrase les pays membres ». L’ancienne ambassadrice a clairement répondu à la remarque. « De quelle autre Europe parlez-vous ? Nous sommes dans une Europe où chaque pays membre est représenté. Soit nous construisons ensemble l’Europe, soit l’Europe n’existe pas ». Marie Bernard-Meunier a précisé que « L’Europe est d’abord un enjeu politique, ce n’est pas uniquement une organisation économique comme elle est gérée actuellement ». Un autre participant a exprimé sa peur de voir les politiques protectionnistes s’emparer de l’Europe, notamment suite au Brexit.
Parmi les participants, la plupart assume leur choix politique macroniste. « Je peux le dire, Emmanuel Macron est le seul candidat qui, par ses idées, ses valeurs et sa personnalité, me montre un réel changement et une réelle envie politique. C’est le seul candidat pour lequel je me vois voter. Je suis venu ici ce soir pour la conférence, mais aussi car je me rapproche du mouvement dans les idées », avoue Jérôme, salarié de 39 ans, à Montréal depuis 3 ans. Titouan, 20 ans, étudiant, n’a pas encore choisi de candidat, même s’il se rapproche des idées d’Emmanuel Macron. Il est venu écouter le débat et prendre ce qui lui servira pour choisir. Séduit par l’ancien ministre, il n’écarte pas l’idée de voter pour lui, et est reparti ravi de la conférence.
Une intervention musclée des représentants de l’UDI Montréal a toutefois animé la soirée; les jeunes centristes ont reproché l’engagement politique auprès d’Émmanuel Macron des intervenants, pourtant annoncés comme « apolitiques » par les organisateurs et les intervenants eux-mêmes.
Le Mexique, la Canada et l’Union européenne sont dans le viseur de Donald Trump
La préoccupation d’Émmanuel Macron pour une réelle union européenne solide a nourri et initié cette conférence, selon les organisateurs. Lors du visionnement du petit film célébrant les 30 ans d’Érasmus, on voit un Émmanuel Macron, fervent défenseur du programme, qui souhaite développer le projet à d’autres sphères que les étudiants, pour ouvrir l’accès à l’Europe à d’autres milieux.
« Donald Trump est en train de transformer le monde à l’image de la campagne xénophobe, nationaliste et protectionniste qu’il a menée. Les premières semaines de Trump sont encore plus inquiétantes que ce qu’il nous a montré pendant la campagne. Il veut construire des murs, renforcer les frontières et les tarifs douaniers. Le Mexique est dans son viseur mais aussi le Canada et l’Union européenne. L’enjeu essentiel de cette élection dans le contexte actuel, c’est tout de même de réformer l’Union Européenne pour qu’elle puisse permettre aux européens de garantir leur sécurité et d’assurer leur prospérité », ont déclaré les référents du mouvement macroniste. L’enjeu est en effet de taille: des élections importantes dans le monde et un élan protectionniste planétaire en marche. « La nouvelle guerre actuellement va être les pro-Europe versus les anti-Europe », précise Marie Bernard-Meunier. Selon elle, Les futures élections françaises donneront une partie de la réponse à l’avenir de l’Europe.
Le mouvement En Marche Montréal promet pour les semaines à venir de nouvelles conférences citoyennes, « avec une perspective nord-américaine », autour de la laïcité, « loin des clichés identitaires portés par les conservateurs ». Également, des conférences sur l’économie collaborative, sociale et solidaire. Enfin, il est annoncé une conférence sur l’Enseignement supérieur sur le thème « comment l’Université peut reprendre toute sa place dans sa promesse de mobilité sociale ». Prochain rendez-vous le 7 février.
(crédit photo: Cédrelle Eymard)