Par Maëlle Besnard et Nathalie Simon-Clerc
François Lubrina joue son va-tout. L’élu sortant a profité de la tribune des célébrations du 8 mai pour faire campagne, et arranguer les anciens combattants, au coeur de son électorat. Tête de liste de l’UMP en 2009, il se retrouve aujourd’hui lâché par ses anciens colistiers, présents sur deux autres listes. Néanmoins, le vétérinaire se fait fort de remporter cette difficile bataille, et conserver son mandat pour tenir tête aux autorités consulaires et diplomatiques.
« Je veux vous défendre », lance François Lubrina. L’homme aux méthodes contestées, mène un difficile combat électoral, qui pourrait être le dernier, décalée par rapport à ses concurrents. Alors que le vote par internet remporte un vif succès, l’élu sortant fait campagne sans site web ni facebook. Selon lui, cette technologie ne sert à rien, car « les jeunes qui passent leur temps sur internet, ne sont pas inscrits sur les listes électorales ». Il préfère le contact des Français qu’il connait bien, ceux des associations d’anciens combattants notamment. Et l’homme y est à l’aise. Il en rajoute, tape dans le dos de l’un, trinque avec un autre.
Le conseiller sortant se targue de faire campagne directement auprès des gens, sans organiser de réunion comme les autres listes. Selon lui, les autres candidats ne sont pas suffisamment proches des Français de la circonscription. « Ce qui différencie les candidats ce n’est pas les programmes, tout le monde est pour la vertu, ce qui va les différencier c’est la capacité à monter au créneau, à se battre », explique-t-il. « Les élections, ce n’est pas la ligue d’improvisation, il faut connaître les problèmes de la communauté », ajoute-t-il en visant ses jeunes adversaires qu’il juge inexpérimentés. Sa proximité avec les Français du Québec est le fer de lance du discours du candidat. Il reproche aux autres candidats d’être déconnectés de la réalité et de faire des propositions désuètes, au lieu d’être sur le terrain
La communauté, il la pratique depuis 44 ans maintenant, alors qu’il venait poursuivre ses études vétérinaires au Québec. Il est de tous les combats, jusqu’à exaspérer les autorités consulaires et diplomatiques. Bourses scolaires, reconnaissance des diplômes, « oubliés de Buffalo« , Français Lubrina est sur tous les fronts, « incontrôlable » diront certains. En 2010, il mène la charge contre son propre camp (Nicolas Sarkozy, président de la République, veut réduire les effectifs et les services consulaires au consulat de Moncton), et exige le maintien de la délivrance des passeports à Moncton. Avec Anne-Lise Blin, aujourd’hui candidate, il monte une association pour défendre les Français des provinces atlantiques.
« Défendre », « se battre », sont les maitre-mots de la campagne de ce vétérinaire de 66 ans, qui tente de conserver son mandat pour une troisième fois. Exclu de l’UMP en 2012 pour avoir tourné le dos à Frédéric Lefebvre élu député en 2013, l’homme est très contesté pour ses méthodes que beaucoup désapprouvent. On le soupçonne même d’être l’initiateur de listes « fantômes » dans la belle province. « Le crime est signé », avait asséné Ange Sitbon, le directeur des élections de l’UMP, lors du dépôt des listes. Sa liste « La Droite Unie » est au coeur des rumeurs. Elle soutient l’UMP qui pourtant ne la soutient pas. Son affiche électorale, placardée dans le local des anciens combattants, fait la part belle à Alain Juppé, qui a passé quelques années au Québec, mais qui a pourtant écrit qu’il soutenait la liste de Michaël Pilater.
Après avoir serré quelques mains, l’élu sortant range soigneusement son écharpe tricolore, symbole de la République selon lui, car il compte bien l’utiliser encore six ans de plus.
Un reportage de Maëlle Besnard et Nathalie Simon-Clerc :