Durant tout l’été, c’est dans près de 15 lieux publics montréalais que va s’installer le Cinéma sous les étoiles de Funambules médias. En plein air, le public québécois pourra assister à 61 projections de courts, moyens et longs métrages, suivies de discussions avec des invités proches de la thématique du film. C’est un cinéma documentaire social et politique engagé, venant d’ici et d’ailleurs que propose ce festival estival. Les productions françaises sont, cette année encore, très présentes sur les écrans, dont le célèbre Merci patron! du député mélanchoniste François Ruffin.
Par Léa Villaba
Après une soirée d’ouverture « très réussie » le 26 juin, selon le programmateur Nicolas Goyette, l’Outarde Libérée a souhaité en savoir plus sur cette 9ème édition.
Entrevue recueillie par Léa Villaba:
L’Outarde Libérée : C’est la 9e édition déjà du festival. D’après vous, qu’est-ce qui change chaque année?
Nicolas Goyette : on est en train de consolider toutes nos opérations, alors ce qui change c’est qu’on est mieux organisé qu’avant. En plus, cette année, on a des invités à chaque projection, il y a beaucoup de partenaires ! On est en collaboration avec plein d’autres festivals comme les RIDM, vues d’Afrique, festival Présence autochtone, mais aussi l’Espace Filmique et cinéma politica ! Cette année, chaque soirée est vraiment un événement et ça, ça a beaucoup changé.
Au niveau de la programmation, c’est qu’au fil des années, on a de plus en plus de longs et moyens métrages internationaux. Maintenant, on arrive à avoir des films qu’on n’aurait pas pu avoir dans le passé. « This is Congo » de Daniel McCabe par exemple ou encore « Complicit » de Heather White et Lynn Zhang sur les l’usine d’iPhone ou les employés sont exposés à des émanations toxiques. On pense aussi à « Plastic China » de Jui-Liang Wang, « Derniers jours à Shibati » de Hendrick Dusollier. Ce sont des films qu’on est vraiment contents d’avoir !
L’Outarde Libérée: Comment choisissez-vous les films ?
Nicolas Goyette: Pour les courts-métrages, on a un appel à projets donc les gens peuvent présenter leurs films et il y a également des prix à gagner. Pour les moyens et longs métrages, on a un comité. On va vraiment les chercher, on va voir ce qu’il se passe dans les autres festivals à travers le monde, des fois on fouille en dehors des festivals pour avoir des films sur des sujets qui nous intéressent. On a un grand intérêt pour tout ce qui est documentaire social et politique.
Le sujet est très important, mais on essaye d’avoir un équilibre avec des esthétiques plus cinématographiques aussi. On cherche un équilibre dans les films eux-mêmes et entre les films. On a des films grand public et d’autres plus pointus.
L’Outarde Libérée: Dans votre programmation, pouvez-vous me parler des productions françaises ?
Nicolas Goyette: Chaque année, on va quand même en chercher pas mal. Je pense au film « Regarde ailleurs » d’Arthur Levivier par exemple, c’est un excellent film sur la jungle de Calais. Tout le monde en a entendu parler à la télé, mais lui il va vraiment sur place pendant quelques années. Ça ajoute vraiment un regard intéressant qui permet de voir les choses autrement.
Il y a aussi « Derniers jours à Shibati », c’est du cinéma direct. Le réalisateur se met un peu en scène, on sent qu’il est en Chine, qu’il ne parle pas chinois et qu’il essaye de se démerder, c’est vraiment intéressant !
Amandine Gay aussi avec son film « Ouvrir la voix », c’est un film qui est assez pertinent surtout aujourd’hui avec ce qu’il s’est passée dans les derniers deux ans notamment par rapport aux femmes, mais aussi mouvement Black Lives Matter. Je pense que ça tombe à pic !
« Le roundup face à ses juges » est un film beaucoup plus axé sur le contenu. Marie-Monique Robin a fait une recherche extraordinaire pour ce film ! J’ai vu peut-être 4, 5 ou 6 documentaires sur le roundup et sur Monsanto, et j’ai réussi à apprendre quelque chose dans ce film-là ! Ça veut dire qu’elle a fait son travail, vraiment ! c’est un must ! Il faut le voir !
Sinon il y a aussi « Le fond de l’air est bleu » de Gianna Moroldo Bianchi, Nemo et Zola. C’est une gang plus militante ! C’est sur la police, les CRS, aussi en lien avec la loi travail, les mouvements qui ont eu lieu il y a quelques années. On trouve ça toujours pertinent de voir ce que la police fait !
« L’empire de l’or rouge » c’est une collaboration France-Québec de Jean-Baptiste Malet et Xavier Deleu. C’est un portrait assez captivant du monde de la tomate internationale. La recherche est bien faite. Ils utilisent la tomate, mais ça aurait pu être autre chose ! C’est pour montrer le capitalisme agro-industriel qui détruit tout sur son passage, qui fait en sorte qu’il y a des paysans en Afrique de l’Ouest qui ont de la misère à vendre leurs tomates parce qu’ils doivent concurrencer la tomate chinoise qui est vendue partout. Ça va très loin, c’est bien fait.
Il y a aussi des collaborations avec la France comme « Maman Colonelle » ou « Merci patron » qui est notre best of de l’an dernier avec François Ruffin. Et pour une fois, c’est les bons qui gagnent alors ça fait changement ! (rires !)
L’Outarde Libérée: Décelez-vous dans tous ces films une empreinte française, des caractéristiques spécifiques ?
Nicolas Goyette : Par exemple, dans « Visages villages » d’Agnès Varda, on voit très bien l’empreinte française. Après pour le reste, pas forcément. Des fois oui. Ça dépend plus des cinéastes et des influences qu’ils ont eues, je pense.
Dans les années précédentes, on avait présenté des films français des fois plus spécifiques (notre dame des landes par exemple). Il ne faut pas que les films soient trop spécifiques à un lieu non plus. Il faut que les gens ici soient au courant du sujet. Il faut que ça touche le plus de gens possible. Et c’est la même chose pour le Québec ! Pour percer à l’international, il faut que ça touche le monde.
Après, ce qu’on aime, c’est confronter les points de vue, du Québec, de la France et d’ailleurs à l’international avec des films belges, étatsuniens, chinois.
Après une première réussie, des projections variées et des événements sont prévus durant toute la saison estivale ! Un festival qui permet de s’intéresser au monde, de se conscientiser et de s’informer tout en étant confortablement installé, une bière à la main, dans les beaux parcs de la métropole ! Quoi de mieux !
Cinéma sous les étoiles, du 26 juin au 30 août 2018: http://cinemasouslesetoiles.org/
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