La deuxième édition montréalaise du Monde Festival se tiendra les 25 et 26 octobre prochains au Musée des Beaux-Arts de Montréal et à l’Université Concordia. 15 conférences seront proposées dans ce festival organisé par Le Monde et Le Devoir, où il sera question d’environnement, d’égalité des sexes, d’urbanisme, de culture ou de nouvelles technologies. Brian Myles, directeur du Devoir, répond aux questions de L’Outarde Libérée.
Propos recueillis par Romain Lambic – photo par Le Devoir

L’Outarde Libérée : le thème « agir » a été choisi pour cette 2e édition du Monde Festival à Montréal. Quels sont les enjeux de cet événement ?
Brian Myles : Le thème de la première édition montréalaise du Monde Festival était « ensemble », qui nous permettait d’appuyer les relations fortes entre la France et le Québec. Pour cette seconde édition, avec « agir », nous souhaitons non-seulement proposer des regards croisés, mais également encourager la création de nouvelles possibilités et trouver des solutions aux problèmes contemporains que nous vivons de chaque côté de l’Atlantique. Nous devons par ce biais mieux comprendre nos sociétés, notre monde et explorer les pistes d’actions possibles. Les conférences organisées dans le cadre de ce festival sont accessibles au grand public : l’année dernière, des étudiants, des lecteurs du Devoir, des québécois d’origine française et des habitués du Musée des Beaux-Arts ont assisté aux échanges. Les intervenants, français et québécois, sont notamment composés d’acteurs politiques, de professeurs d’université, de chercheurs, de membres d’ONG ou encore de professionnels concernés par les sujets abordés.
L’O.L. : Qui seront les principaux intervenants et les thèmes abordés ?
B.M. : Le ministre français de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer, et l’ancienne première Ministre québécoise Pauline Marois interviendront dans un atelier autour de la maternelle. Alors qu’aujourd’hui, au Québec, les enfants arrivent en maternelle à l’âge de 4 ans, les Français parlent de la scolarisation dès 3 ans. Nous allons nous demander si le modèle français est efficace et exportable, nous discuterons également des moyens de lutter contre les inégalités socio-économiques dès la petite enfance. Jean-Jacques Aillagon, ancien ministre de la Culture sous Jacques Chirac, et Nathalie Bondil, directrice du Musée des Beaux-Arts de Montréal tout juste décorée de la Légion d’honneur, aborderont le thème Est-ce aux politiques de faire le beau, qui fait écho à l’incendie et à la rénovation de Notre-Dame de Paris. Notons également la présence de Yoshua Bengio, pionnier dans l’apprentissage automatique, sur la conférence autour de l’intelligence artificielle dans la société de demain et de Dominic Champagne, initiateur du Pacte pour la Transition dans notre débat sur l’urgence climatique. Nous aborderons également les thèmes de l’urbanisme, de l’égalité des sexes (bilan du mouvement #MoiAussi et réflexion sur le modèle contemporain de la famille), du « surtourisme », des relations complexes avec les Etats-Unis, de l’égalité entre les territoires ou encore de l’influence du rap et du hip-hop sur les codes linguistiques.
L’O.L. : Vous animerez vous-même une conférence autour de la « vérité journalistique »…
B.M. : Nous allons en effet aborder dans cette conférence l’avènement des fausses nouvelles, un problème que rencontre l’ensemble des médias dans le monde Occidental. Nous faisons face à une surabondance de l’information, dans laquelle les faits sont malmenés. Beaucoup d’acteurs importants utilisent le concept des fausses nouvelles à toutes les sauces et de manière galvaudée, à l’image de Donald Trump. La notion du fake news est évoquée par des personnes aux agendas populistes et/ou autocrates qui veulent réduire les médias au silence. C’est un phénomène que nous pouvons observer partout dans le monde. Le Québec est, pour le moment, relativement épargné par cette vague, mais celle-ci finira par arriver. Nous devons nous interroger sur notre rôle, sur notre capacité à dépister les fausses nouvelles et améliorer nos réflexes de vérification.
L’O.L. : Vous organisez ce festival avec Le Monde, comment se sont nouées les relations entre les deux journaux ?
M.B. : Il y a toujours eu de fortes relations entre Le Monde et Le Devoir. Nous avons accès à certains articles de notre homologue français et des journalistes du Monde peuvent voir leurs articles repris et signés de leur nom dans notre journal. Il y a une certaine compatibilité entre les deux titres, nous nous efforçons de proposer un journalisme et un contenu de qualité. Le Monde voulait élargir ses horizons et exporter son festival (ndlr : organisé depuis 2014) à Montréal. Les fortes relations entre la France et le Québec était l’une des principales raisons à la tenue de cet événement ici. Ce sont des liens de cœur, de sang et d’esprit qui ne se sont jamais atténués. Cela se vérifie avec la mobilité : de plus en plus de français viennent étudier et s’installer, et beaucoup de québécois rencontrent un franc succès dans les domaines de l’art, de la culture ou de la littérature. Il y a un pont naturel entre nous et ce festival doit permettre de comprendre comment appréhender ensemble les problèmes et les défis du monde contemporain.