Le ramassage des vidanges sera peut-être bientôt de l’histoire ancienne au Québec. Le groupe français Derichebourg, qui vient de remporter deux arrondissements de Montréal, compte bien imposer ses méthodes, ses valeurs et ses camions blancs immaculés dans les rues de la métropole, et faire de Montréal, sa base arrière pour se développer en Amérique du nord.
« Les gens sortent pour nous prendre en photo, ils n’ont jamais vu ça », se réjouit François Dieumegarde, le contremaître québécois chargé de l’exploitation du groupe Derichebourg à Rosemont-La-Petite-Patrie et Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce. Les deux arrondissements sont tombés dans l’escarcelle du groupe français en ce début d’année 2016. Il faut dire que les camions blancs flambant neufs siglés du bison français, les uniformes oranges et les chaussures de sécurité des éboueurs, tranchent avec les « ramasseux de vidange » que les Montréalais ont l’habitude de croiser depuis toujours. « Notre personnel est fier et se sent valorisé », renchérit François Dieumegarde.
Et Thomas Derichebourg, le petit-fils du fondateur du groupe Derichebourg, a de grandes ambitions pour développer son entreprise en terre américaine. À la tête d’une équipe de 50 personnes et de 20 véhicules, Stanislas Le Moine, responsable du développement du site montréalais d’Anjou, a pour mission de doubler le chiffre d’affaires d’ici à la fin de l’année. Le groupe Derichebourg va se positionner sur tous les renouvellements de contrats dans la province, et veut créer 500 emplois dans les cinq prochaines années. Aujourd’hui, 400 tonnes d’ordures ménagères sont ramassés chaque semaine dans chaque arrondissement.
Une vision née dans les années 60
C’est lors du voyage du président François Hollande au Canada, en novembre 2014, que l’idée de s’implanter en Amérique du nord germe dans la tête de Thomas Derichebourg. « J’ai vu le véritable potentiel, car il n’y a pas la même valorisation des déchets ici », estime le dirigeant. Les grands espaces canadiens ont permis l’enfouissement quand l’Europe faisait d’autres choix. En 50 ans, le groupe Derichebourg a développé une expertise contrainte par une réglementation européenne exigeante. C’est dans les années 60 que nait l’entreprise Derichebourg. Le grand-père de Thomas débarrassait les caves et triait ce qu’il récupérait. « Mon grand-père était un immense visionnaire, il avait compris la notion de recyclage et de valorisation des déchets dans les années 60 », explique le quadragénaire. C’est pourtant son fils, Daniel, qui va développer l’entreprise dans les années 70-80, en gagnant notamment les marchés des Hôpitaux de Paris et d’Aéroport de Paris. Aujourd’hui, le groupe Derichebourg compte 30 000 personnes, réalise 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires et s’est implanté dans 15 pays.
Imposer ses méthodes en terre américaine
L’organisation du travail, les valeurs sociales du groupe et la traçabilité des déchets séduisent le maire de Montréal, peu habitué à une telle organisation dans ce domaine, qui accepte que le groupe Derichebourg soumissionne à Rosemont et Côte-des-Neiges. C’est en fin d’année 2015, lors de la COP21, alors que le groupe Derichebourg gérait les déchets de l’évènement mondial, que Thomas Derichebourg et Denis Coderre scellent leur entente. Derichebourg Canada Environnement voyait le jour. « La Ville de Montréal priorise toujours des services publics efficaces et efficients », assurait alors le maire de la métropole québécoise.
Mais ce sont surtout ses méthodes et son expertise que le groupe Derichebourg veut développer en terre américaine. Camions blancs modernes, vidés et lavés quotidiennement et repérés par GPS, tournées standardisées, procédures de sécurité, caméras embarquées, uniformes de travail adaptés, formation, … l’entreprise française veut imposer son organisation et ses méthodes bien rodées pour déclasser ses concurrents. « On ne va pas dénaturer nos organisations même si c’est différent ici, assure Fabrice Lancia, directeur du développement, pour nous, c’est notre quotidien ».
Le ramassage des ordures ménagères, un vrai métier
Les dirigeants insistent sur les valeurs sociales de l’entreprise et sur la fidélisation du personnel, « image de marque » du groupe. « C’est un vrai métier, car nos métiers sont très techniques », expose Thomas Derichebourg. D’ailleurs l’entreprise cumule les certifications : ISO 9001, ISO 14 001 et ISO 18 001.
Même si la containérisation reste embryonnaire à Montréal, l’entreprise française assure que ce domaine va beaucoup évoluer dans les années à venir, et que des discussions ont lieu avec les élus de la ville. Une aubaine pour Derichebourg dont l’expertise dans ce domaine pourrait lui donner une longueur d’avance sur ses concurrents. « Plus c’est containérisé, plus c’est mécanisé, plus c’est facile pour les conditions de travail et le stockage », justifie Thomas Derichebourg, bien décidé à s’imposer en terre américaine.
(crédit photo de Une : Derichebourg)
Bonjour,
Je suis québécoise et j’aime beaucoup lire les articles de l’Outarde Libérée. L’article en question m’a attiré, car l’entreprise française mentionnée arrive au Québec avec ses méthodes et son savoir-faire, car la gestion des déchets en France est différente d’ici. L’article m’a laissé un peu sur ma faim dans le sens que, comme québécoise, je cherchais à savoir quelles sont ces méthodes et qu’est-ce qu’on fait en France de différent?
Merci beaucoup pour votre article.
Bonjour Stéphanie, notre article était plutôt à caractère économique plus que technique. En deux mots, Derichebourg arrive avec des méthodes qui intègrent des normes plus élevées qu’ici, car en vigueur en France, comme la fourniture du matériel de protection (chaussures, combinaisons…), fourni obligatoirement par l’employeur dans l’Hexagone et pas toujours ici. Merci pour votre fidélité
Merci!