Dans le cadre du festival Escales Improbables et du festival Québec en toutes lettres, Les Souffleurs commandos poétiques prendront d’assaut Montréal et Québec jusqu’au 1er novembre prochain. Avec leurs performances poétiques inattendues, les membres de ce collectif bousculent les limites traditionnelles de la poésie et nourrissent une réflexion plus qu’actuelle sur l’accélération constante de nos rythmes de vie. Une occasion pour le public québécois de prendre part à une expérience artistique hors du commun.
Par Sandrine Bourque, rédactrice en chef adjointe
C’est en 2001, sous l’impulsion de l’acteur français Olivier Comte, que Les Souffleurs commandos poétiques voient le jour. Basé à Aubervilliers, en banlieue parisienne, le collectif, aujourd’hui composé d’une quarantaine d’artistes – comédiens, écrivains, danseurs ou plasticiens -, s’est donné pour mission de « transformer le monde par la poésie » en réalisant des performances poétiques qui prennent d’assaut l’espace public et forcent le spectateur à ralentir son rythme pour y prendre part.
Dix-sept ans après sa création, le collectif a réalisé plus d’une centaine d’interventions artistiques dans l’espace public, en France et à l’international. Les Souffleurs ont déjà conquis le public sur les cinq continents, du Mexique à la Syrie, de la Roumanie au Japon… en passant par le Québec. Grâce à un partenariat entre le festival Escales Improbables de Montréal, le festival Québec en toutes lettres, Bibliothèques et archives nationales du Québec (BANQ) et le Consulat général de France à Québec, Les Souffleurs ont ainsi posé bagage à Montréal le 14 octobre, première escale d’une tournée de deux semaines qui prendra fin le 1er novembre.
Alors que leur périple dans la métropole s’achève aujourd’hui, après une semaine de performances et d’ateliers, les Souffleurs reprennent la route ce dimanche, direction Québec, où ils performeront du 22 au 28 octobre dans le cadre du festival Québec en toutes lettres. Cinq membres du collectif poursuivront ensuite la route jusqu’à Natashquan où ils souffleront, du 30 octobre au 1er novembre, les mots de la poétesse innue Joséphine Bacon en marge du Festival du conte et de la légende de l’Innucadie.
Des performances poétiques hors du commun
Les Souffleurs sont connus partout à travers le monde pour leurs « commandos poétiques », terme qui désigne leurs modes d’intervention artistique dans l’espace public. Le collectif proposera ainsi trois types de performances au public québécois. Lors des Apparitions/Disparitions, les Souffleurs chuchoteront à l’oreille des passants des poèmes ou des extraits d’oeuvres littéraires à l’aide de longs tubes dans lesquels les mots sont soufflés dans leur langue originale, soit le français, l’anglais et l’innu lors de leur escale à Natashquan.
Les Regardeurs envahiront aussi la Capitale Nationale : perchés au sommet de la bibliothèque Gabrielle-Roy, au coeur du quartier Saint-Roch, ces Souffleurs placés en position de vertige scruteront la ville et réaliseront des interventions poétiques, semant dans le vent des extraits de poèmes retranscrits sur des feuilles mobiles, ou brandissant des écriteaux-poèmes que les passants pourront, depuis le sol, lire à l’aide de jumelles, devenant à leur tour des « Regardeurs d’en bas ».
Les Souffleurs proposeront enfin au public québécois des Levées d’écriture vagabonde. Lors de ces ateliers, les participants seront invités à confectionner des panneaux proposant des phrases positives et inspirantes. Ces panneaux seront ensuite brandis dans les espaces publics afin de provoquer le ralentissement des passants et de leur permettre vivre une réelle expérience poétique hors du rythme battant des villes. Avec ces levées, les Souffleurs entendent désenclaver la poésie des livres et la brandir dans l’espace public.
Transformer le monde par la poésie
Derrière ces expérimentations poétiques se déploie une démarche artistique complexe et engagée. Complexe, d’une part, puisque les Souffleurs prennent soin de questionner poétiquement chaque lieu afin d’élaborer des interventions poétiques adaptées, mais aussi de tisser des liens avec les habitants, qui deviennent partie prenante de l’oeuvre. Engagée, d’autre part, car l’objectif avoué des Souffleurs est de transformer le monde par la poésie.
Armés de leur pensée poétique, les Souffleurs exhortent ainsi le public à ralentir, le temps d’un souffle, le temps d’un chuchotement poétique. « Le coeur de notre démarche s’articule autour d’une tentative de ralentissement du monde », explique Olivier Comte, le directeur artistique du collectif. « Nous ne pouvons pas vous expliquer précisément ce que cela veut dire. Mais quand nous parlons de ralentissement du monde, tout le monde comprend à sa manière le sens de notre démarche. Nous avons tous le sentiment à un moment donné que la vitesse effrénée du monde le rend de plus en plus inhabitable. »
En forçant le public au ralentissement, les Souffleurs cherchent ainsi à aborder la question de l’accélération croissante des rythmes de vie, mais aussi à bousculer leur public en suscitant l’émotion. « Ce que nous voulons, c’est bouleverser les gens, parce que le bouleversement est le coeur de tout acte artistique fort, reconnaît Olivier Comte. Mais pour y parvenir, il nous faut donner aux gens le temps de ralentir, de s’arrêter, de se laisser le temps d’être bouleversé. Il faut leur donner le temps de vivre. »
Les Souffleurs commandos poétiques seront à Québec du 22 au 28 octobre prochain. Pour suivre leur tournée dans la capitale nationale, rendez-vous sur le site web du festival Québec en toutes lettres.
Pour en savoir plus sur Les Souffleurs commandos poétiques, rendez-vous sur le site web du collectif.