La Chute de l’Empire Américain, réalisé par Denys Arcand, sort au cinéma en France le 20 février. Ce film dénonce une société où l’argent est roi et raconte l’histoire rocambolesque de Pierre-Paul, un livreur qui va se retrouver malgré lui dans de beaux draps.
Par Romain Lambic
« Si t’es si intelligent, pourquoi n’es-tu pas président d’une banque ? – C’est parce que je suis trop intelligent. L’intelligence est un handicap… ». Le décor du film est planté. C’est par cet échange et une rupture amoureuse que débute l’histoire de Pierre-Paul, interprété par Alexandre Landry, un homme très banal. Plus intelligent que la moyenne et diplômé en philosophie – il évoque beaucoup de références littéraires, il travaille à Montréal comme chauffeur pour une société de livraison, job qui lui permet de rembourser ses dettes d’études, à l’image de nombreux Nord-Américains.
Très charitable, il est toujours prêt à aider son prochain. Toutefois il se révèle très naïf et maladroit avec les femmes. Alors qu’il fait sa tournée habituelle, il arrive devant un magasin où un braquage tourne mal. Deux bandits s’entre-tuent et le troisième prend la fuite une balle dans la cuisse en laissant traîner le butin – de quelques millions de dollars canadiens – dans des sacs de sport, sous le nez de Pierre-Paul. Sans réfléchir, ce dernier saisit les sacs et les range dans son camion alors que la police arrive.
Rencontre entre un intello, une escorte et un repris de justice
Ce qu’il ne sait pas encore, c’est que cet argent qu’il a « emprunté » et dont il ne sait pas quoi faire va bouleverser son destin et lui faire rencontrer une escorte-girl, nommée Aspasie (en référence à une célèbre courtisane contemporaine de Socrate), interprétée par Maripier Morin. Il va également mêler dans son histoire un repris de justice tout juste sorti de prison, Sylvain Bigras, alias « The brain », interprété par Rémy Girard – que Denys Arcand a déjà fait jouer dans Le Déclin de l’Empire Américain et Les Invasions Barbares.
Chaque personnage dans ce film, même secondaire, a une influence sur son issue, quelque peu rocambolesque. La Chute de l’Empire Américain est un parfait reflet de notre monde actuel, dans lequel l’argent est devenu primordial dans la quête de chacun d’un bonheur malheureux. Le film montre également avec subtilité comment cet argent peut gâcher la vie de jeunes personnes ou faire tomber des têtes très facilement. Denys Arcand met aussi en avant dans ce film la facilité avec laquelle on peut faire disparaître de l’argent par la création de sociétés offshores ou d’« oeuvres de charité » domiciliées dans des paradis fiscaux. Tous les aspects de la société sont représentés dans cette œuvre, des plus riches aux plus démunis.
Après le sexe et la mort, l’argent
Pour créer les personnages de ce film, Denys Arcand s’est beaucoup inspiré d’expériences personnelles et de rencontres singulières et surprenantes : une rencontre dans un bar avec une escorte-girl très calée en économie ou encore l’histoire d’un chef d’une bande de motards criminels, un prisonnier qui sortait de sa cellule tous les jours pour suivre des études de commerce. Le scénario de La Chute de l’Empire Américain est très bien ficelé avec quelques rebondissements sympathiques ou cyniques. Le film en soi n’est pas extraordinaire, mais il est pur et authentique. Après Le Déclin de l’Empire Américain, dont le sujet central était le sexe et Les Invasions Barbares, qui tournait autour de la mort, Denys Arcand conclut sa trilogie avec ce film évoquant le triomphe de l’argent. « Aujourd’hui, seul le fric est roi », constate-t-il.