Le 19 février dernier, une conférence organisée par les CPA du Québec, accueillait Philippe Arraou, président du Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables en France, à l’hôtel Reine-Elizabeth de Montréal. Les grands défis de la profession y ont été abordés afin de répondre à l’ultime question : Comment adapter la profession d’expert-comptable à l’économie numérique ?
Par Tahia Wan
Cette conférence dans l’ère du temps, reprend des éléments déjà évoqués lors du congrès de l’Ordre des experts-comptables en France en septembre dernier, notamment sur l’aspect numérique de la sécurité de la profession et l’avenir de la fiscalité.
Une création destructrice
« Aujourd’hui, la comptabilité n’est plus ce qu’elle était, elle est devenue accessible à tous », s’est exclamé Philippe Arraou. La dématérialisation des fichiers (bulletins de paie, factures, relevés fiscaux) permise par l’utilisation de nouveaux outils de comptabilité ont profondément modifié la fonction de l’expert-comptable. « Les entreprises ont des compétences en interne et ont de moins en moins besoin de prestataires pour la tenue des comptes », a expliqué M. Arraou.
C’est le principe de création destructrice de Joseph Schumpeter basée sur l’idée qu’avec l’arrivée d’une nouvelle technologie, celles qui sont désuètes disparaissent. « Voilà, pourquoi il me semble impératif que les experts comptables eux- mêmes intègrent la nouvelle technologie afin d’éviter que des intermédiaires ne se mettent entre notre expertise et nos clients », a-t-il déclaré.
Afin d’illustrer son propos M. Arraou n’a pas manqué de citer quelques exemples d’actualité d’un nouveau type de consommation : Uber et Airbnb. « Nous sommes dans cette phase où on utilise un espace nouveau mis en place par la technologie et nos entreprises sont confrontées à ce choc », a-t-il constaté.
Bien que la comptabilité ne soit plus la seule demande dans les cabinets depuis la loi Macron, M. Arraou croit en l’expertise des professionnels. « Nous sommes régis par des règles d’éthique et de déontologie strictes, et là est la différence qui nous permettra d’accompagner les entreprises dans leur transition numérique », a-t-il ajouté.
Sécurité des données et fiscalité
Qui dit règles d’éthique dans la profession d’expert-comptable dit protection des données personnelles du client. « Avec la dématérialisation, on n’enregistre plus de factures mais on récupère des données. Notre profession est concernée car nous ne savons pas ce que deviennent ces informations », s’inquiète M. Arraou.
En France, la profession d’expert-comptable repose sur un engagement de responsabilité personnelle. Les experts-comptables ont un devoir de réserve sur la tenue des comptes. Au Québec, il n’existe pas de réglementation sur les comptes.
Amazon ou Google : comment faire contribuer les acteurs de l’économie à la fiscalité locale?
L’application de la fiscalité représente un autre grand défi dans une économie numérique puisque la notion d’établissement permanent sur laquelle repose sa mise en place n’est pas adaptable. Là encore, de grands exemples, comme Amazon en France, ont été cités. Pour M. Arraou, « il s’agit de savoir comment faire contribuer les acteurs de l’économie à la fiscalité locale ». Quant à l’avenir de la profession M. Arraou espère que seront mis en place des standards et des normes adaptés qui permettront de préparer correctement les états financiers des entreprises.
Parmi les participants à cette conférence organisée par l’Ordre des comptables professionnels agréés du Québec (CPA), on a remarqué la présence de Catherine Feuillet, Consule générale de France à Montréal, de Véronique Loiseau, Directrice générale de la Chambre de commerce et d’industrie française au Canada (CCIFC), mais aussi d’Alain Côté, FCPA, FCA, Président du conseil d’administration de CPA Canada, et de Guy Cloutier, comptable évolutif ayant organisé plus de 750 conférences à travers le monde.
(crédit photo : Ordre des experts-comptables)