Bistro français renommé, Chez Lévêque propose des plats de la gastronomie française avec les produits de saison, se présentant comme une brasserie parisienne authentique et festive. « Nous Cne sommes pas les plus à plaindre, mais ce n’est pas facile pour autant, » introduit Patricia Lévêque.
Chez Lévêque doit s’adapter à tout prix
Fermer a été un choix de la direction avant même une obligation gouvernementale : « Nous ne voulions pas mettre nos serveurs et notre personnel en danger, » explique Patricia Lévêque. Après ça, il a fallu adapter la manière qu’ils avaient de faire pour rester vivant. « C’est un peu comme les artistes en ce moment, on est bloqués, les milieux de plaisir sont fermés, » ajoute-t-elle.
Quant aux stratégies adoptées pour survivre à la crise, elles sont classiques et temporaires. « On s’adapte au jour le jour, comme on peut, » commence-t-elle. Sur son site web rafraîchi pour l’occasion, le restaurant propose des plats à emporter, chose qu’il proposait déjà avant la pandémie mais que les propriétaires ont dû développer. « On ne faisait pas de livraison ou très peu, et on a revu notre carte pour avoir une offre de plats plus large, » précise Patricia. La fin de semaine de la fête des mères a apparemment bien fonctionné, et dès maintenant, le homard sera également au menu. « On a également rajouté des petites choses différentes pour égayer la proposition, mais on a un bon bassin de clients qui connaissent nos produits, » note Patricia Lévêque.
Si Chez Lévêque avait des rénovations prévues de longues dates, elles seraient adaptées s’il reste aux propriétaires les fonds nécessaires pour les mener à bien. « On pense agrandir la partie épicerie quoi qu’il arrive », confie Patricia. Mais il n’est pas certain que ces rénovations puissent avoir lieu. La cogérante se considère bloquée, et sans grande marge de manœuvre pour l’instant.
Au niveau de l’approvisionnement, le restaurant ne rencontre pas de problème autre que celui qu’on peut constater dans les épiceries. Les prix ont légèrement augmenté, ce qui se répercute sur le coût du produit final, surtout la viande, mais tous les produits sont disponibles. « Nos fournisseurs sont contents qu’on recommence à commander chez eux. Ils sont là pour nous, on est là pour eux, » insiste Patricia.
Mais pour combien de temps?
Mais ces stratégies et adaptations ne sont pas viables à long terme. En effet, si Chez Lévêque pouvait faire 200 clients par soir, « ça n’aurait rien à voir ». Et l’aide du gouvernement de 40 000 dollars ne leur est pas destinée, le restaurant dégageant plus de 1,5 million de salaire par année. La seule aide qu’ils perçoivent est sur les salaires qu’ils paient aux employés qui continuent à travailler. « On est chanceux car on est propriétaires de nos murs, mais si la crise venait à durer il faudrait que le gouvernement fasse quelque chose, » espère Patricia.
Parce qu’ils louent aussi certains de leurs murs à d’autres commerçants, Patricia sait que la crise touche tout le monde. L’un de leur locataire a dû cesser ses activités, et ne peux donc pas payer ses loyers. « On ne veut pas le mettre dehors, car c’est une personne et un commerce qu’on estime, mais le gouvernement doit l’aider, » réagit la cogérante de Chez Lévêque. « Ils aident les compagnies pétrolières, les compagnies aériennes parce qu’elles rapportent beaucoup. C’est aussi le cas de l’industrie de la restauration et du tourisme, et ils devraient investir à tous les niveaux, » revendique-t-elle.
Ce qu’on comprend des adaptations qu’ils ont dû faire, c’est qu’elles ne sont que temporaires et permettent de faire tenir le plus longtemps possible le commerce à flot. Mais la pérennité du restaurant n’est pas assurée. « On s’est retournés, oui. On existe encore, oui. Mais au long terme, ce n’est pas viable, » confie Patricia.
Si la solution des livraisons apparaît comme restant lucrative pour les restaurateurs, elle ne remplace pas un service en salle, ou tout ce qui fait l’attrait d’un restaurant. « À moins que cela soit à grande échelle, il y a un coût sur le produit, sur les salaires… » explique Patricia. En plus de ces coûts, la plupart des restaurants qui ont été capable de la faire se sont mis à proposer un service de livraison ou de plats à emporter. « C’est très bien mais ça dilue encore plus l’offre, rendant le tout encore plus complexe pour tout le monde, » constate-t-elle. Un nouveau marché de la nourriture préparée, bien loin des salles calfeutrées et du service au petit soin que proposent la plupart des restaurants montréalais.
[youtube https://www.youtube.com/watch?v=XlBTrbS_lBs&w=560&h=315]L’avenir de la restauration en péril
Au-delà de son restaurant, Patricia déplore le manque de visibilité sur l’avenir de la restauration. « C’est comme une paralysie mondiale, ça laisse très songeur sur la façon d’opérer un commerce, » estime-t-elle. La partie à l’étage de Chez Lévêque, le salon Eska, est effectivement réservée pour des réunions de famille, baptêmes, mariages, séminaires… « On aime se réunir, et je ne vois pas pourquoi cela s’arrêterait après la Covid-19, » estime Patricia. « Apparement la crise a donné aux gens le goût de se rassembler chez eux, moi j’avais déjà le goût avant ça, et je ne vois pourtant pas comment on peut se passer de restaurants, de bars…, » ajoute-t-elle. « J’ai toujours aimé la restauration, et depuis deux mois, je m’ennuie. »
Les employés sont pour la plupart au chômage, et attendent la réouverture du restaurant. « La seule chose qu’on a, c’est un gros espoir que ça ne dure pas jusqu’en 2021, parce que là je ne sais pas comment on ferait, » s’inquiète Patricia Lévêque. En 48 ans d’existence, Chez Lévêque emploie une quarantaine de salariés. « Si l’on ferme, c’est catastrophique, » conclut-elle.
Camille Balzinger
]]>