En marge du sommet du G7 qui débutera à La Malbaie dès demain, le député d’Amérique du Nord et président de la Commission des Affaires Économiques de l’Assemblée nationale, a répondu à nos questions. Le président Emmanuel Macron est déjà arrivé au Canada. Il a eu un long entretien avec le Premier ministre du Canada, Justin Trudeau, hier, et rencontrera le Premier ministre du Québec, Philippe Couillard aujourd’hui à Montréal avant de s’envoler pour la Capitale-Nationale en fin de journée.
Entrevue recueillie par Nathalie Simon-Clerc
L’Outarde Libérée: Le G7 au Québec, sur vos terres, avez-vous eu l’opportunité d’évoquer cette rencontre internationale avec le président de la République ou son équipe, en tant que député de la circonscription ?
Roland Lescure: Je n’ai pas “de terre”, mais ma proximité avec le Canada et mon rôle de Président de la commission des affaires économiques me conduisent naturellement à suivre les dossiers internationaux de près. Ce que je crois c’est que dans un monde incertain, l’Europe doit trouver des partenaires partageant la même vision. Et le Canada de Justin Trudeau est un partenaire indispensable et nécessaire. Je le vis au quotidien en représentant nos compatriotes et c’est un message que je passe à l’Elysée comme auprès des membres du gouvernement : les Français du Canada sont à l’image de leurs pays d’accueil, ouverts sur le monde, attachés à notre modèle économique et social et souvent investis professionnellement dans les compétences de l’avenir. C’est exactement les thématiques qui vont être poussées pendant ce G7 et le prochain en France.
L’Outarde Libérée: Emmanuel Macron a rencontré Justin Trudeau ce mercredi, est-ce qu’il y a un axe France-Canada pour donner un ton particulier à cette rencontre ? Et contrer un voisin américain imprévisible ?
Roland Lescure: La France d’Emmanuel Macron et le Canada de Justin Trudeau ont un certain nombre de points communs : nos deux pays ont tous les deux investi dans les compétences du numérique, font le pari de la transition énergétique et misent sur une croissance plus durable et plus inclusive. La France comme le Canada ont – par tradition – une politique internationale ancrée dans le multilatéralisme, une voix qui porte au Nations unies, une responsabilité assumée dans la protection de notre planète. Par le CETA, le Canada et l’Union européenne ont choisi de construire un nouvel espace économique avec l’ambition de construire des normes internationales qui protègent les droits sociaux, environnementaux comme les droits culturels.
En ce qui concerne les USA je ne pense pas qu’il soit nécessaire d’aller au clash avec notre allié américain. Il faut réfléchir à l’après. Il faut se souvenir que Trump met en place les mesures qu’il a annoncées pendant sa campagne, tout comme Macron le fait en France. Je pense qu’il est nécessaire de répondre aux taxes américaines pour montrer qu’on est dans un dialogue d’égal à égal. Mais pour qu’à la fin on puisse se remettre autour de la table pour discuter de l’après.
L’Outarde Libérée: En tant que Président des Affaires économiques, qu’attendez-vous de ce sommet du G7? Pour la France, mais aussi pour le Canada, votre 2e pays ?
Roland Lescure: Le programme du G7 qui commence à Charlevoix (Québec) cette semaine traite de tous les sujets qui sont chers au Canada et à l’Union européenne. Par exemple, l’UE et le Canada souhaitent créer une agence internationale sur l’intelligence artificielle pour nous préparer à ses défis en matière d’emploi comme d’éthique. Autre exemple : l’Europe et le Canada portent une volonté commune de créer un cadre plus juste sur la fiscalité des géants d’Internet. L’Europe et le Canada enfin souhaitent une mise en œuvre efficace des accords de Paris sur le climat.
Ces thématiques doivent être portées par le G7 pour inventer les protections du futur. Et l’agenda tombe à pic puisque ce sommet sera suivi de celui en France l’année prochaine.
L’Outarde Libérée: Le président Macron rencontrera finalement la communauté française de Montréal. Que faut-il attendre de son message aux Français du Québec, qui ont massivement voté pour lui, mais qui se sentent parfois un peu oubliés ?
Roland Lescure: Je ne sais pas s’ils se sentent oubliés, ce n’est pas ce que j’entends quand je les rencontre. Les Français qui vivent à l’étranger sont avant tout fiers de la transformation engagée en France. Le Président a l’habitude de dire que ce que nous faisons en France nous renforce à l’international. Que pour que la France ait une voix qui porte, il faut qu’elle soit forte et respectée ce qui inclut de faire les réformes que nous avions trop longtemps mis de côté, ce qui implique aussi que l’Europe soit unie et rassemblée.
Plus spécifiquement au Québec, le Président saura trouver les mots pour comprendre ce qui rend Montréal et sa région si attractif pour nos compatriotes et comment la France souhaite valoriser leur talent et leur faciliter la tâche s’ils choisissent de revenir en France.
(crédit photo: Nathalie Simon-Clerc)