Pas moins de 180 personnes ont participé cette année à la 18e édition de la Simulation du Parlement européen Canada-Québec-Europe (SPECQUE), qui avait lieu à Lille du 2 au 9 août dernier, dans le but d’en connaître davantage sur les métiers des acteurs de la vie politique européenne.
Par Charlotte Lopez, journaliste
La SPECQUE donne la chance, depuis 1998, à des Canadiens et Européens de se mettre dans la peau de politiciens tels que des commissaires européens, des rapporteurs de commission, des chefs de groupe politique, des eurodéputés, ou encore des journalistes et des lobbyistes. L’objectif ? Retranscrire pendant une semaine le vrai déroulement d’une séance parlementaire.
Cette année, quatre textes d’actualité européenne étaient proposés aux participants : les travailleurs détachés, les gardes-frontières, les subventions humanitaires et les télécommunications. Une fois acceptés au sein de la SPECQUE au courant de l’année, les participants, âgés d’environ 18 à 40 ans, doivent réaliser un important travail préparatoire de groupe (qu’ils font via e-mail et Skype), afin d’apporter une vision politique adéquate au parti politique qu’ils représenteront. Pendant la semaine du 2 au 9 août, ils devront finalement rédiger, négocier, débattre leurs idées, ainsi que retranscrire les séances plénières selon le système du Parlement européen actuel.
« Il faut préparer un argumentaire et pouvoir l’exprimer, explique Jean-Baptiste Paganon, eurodéputé pour le parti d’extrême droite lors de cette 18e édition de la SPECQUE. C’est un challenge important, un vrai jeu d’acteur très sympa, où tu te moques des choses, tu insistes, tu exagères. En débattant nos idées jusqu’au bout, on rentre dans le bain de nos partis politiques. »
[caption id="attachment_11731" align="alignright" width="300"] Cette année la SPECQUE avait lieu à Lille, dans le nord de la France.[/caption] « Beaucoup de travail, mais beaucoup de plaisir »C’est une première SPECQUE pour Jean-Baptiste Paganon, jeune Français installé depuis cinq mois à Montréal. « Ce qui est bien à la SPECQUE, c’est qu’il y a une grande polyvalence dans les profils des membres, mentionne-t-il. Il y a des gens en droit, en économie, ou encore en politique. Ce mélange des trois disciplines amène une polyvalence intéressante, car on se retrouve avec des approches différentes, des gens différents. Le challenge est là, on se complète tous les uns les autres. »
Cette expérience au sein de la SPECQUE est « intense en travail » durant une semaine, mais les rencontres faites sur place en « valent la peine chaque année », selon Jérémy Paris, un jeune Français habitant à Montréal depuis cinq ans, et membre de la SPECQUE depuis maintenant deux ans : « On pourrait associer la SPECQUE à la devise « Work hard, Play hard », car on passe notre temps à travailler de 9 h à minuit, puis ensuite on rencontre personnellement les gens avec qui on vient de passer la journée à débattre, en allant boire un verre. On crée des liens très forts en seulement une semaine. »
Jérémy Paris était lobbyiste cette année pour la SPECQUE, il représentait les travailleurs, les citoyens et les consommateurs européens face à un groupe de lobbyistes qui représentaient les intérêts des entreprises. Il a déjà fait la SPECQUE en août 2014 à Edmonton comme eurodéputé représentant le parti socio-démocrate. « On peut participer à la SPECQUE plusieurs fois de suite, soit en candidat libre, soit en participant à des délégations étudiantes dans des universités, souligne-t-il. Il y a une majorité d’étudiants (18-25 ans), mais aussi de jeunes diplômés et jeunes professionnels (30-35, voire 40 ans), qui font le cœur de la SPECQUE. »
La SPECQUE, « beau melting-pot créateur d’opportunité »
Fondée par des étudiants de l’Université de Laval (Québec) dans le but d’expliquer le fonctionnement des institutions européennes et de sensibiliser les Québécois à la politique de l’Union européenne, la SPECQUE a très vite eu la volonté de faire une année sur deux la simulation soit au Canada, soit en Europe. « Cette année c’était à Lille, l’année dernière à Edmonton, et l’année prochaine ce sera à Sherbrooke par exemple, indique Jérémy Paris, les jeunes viennent de toute l’Europe, c’est magique comme projet. »
La SPECQUE est créatrice d’opportunités aussi bien pour les Européens que pour les Canadiens au niveau des institutions canadiennes et européennes. Elle permet en effet de se constituer un très bon réseau, surtout avec les anciens qui ont des fonctions importantes et/ou intéressantes aujourd’hui sur le marché du travail. « La SPECQUE permet de booster une carrière professionnelle, elle représente plein de bénéfices, autant humainement que professionnellement », ajoute Jérémy.
Pour lui, c’est aussi un bon moyen de faire vivre la francophonie. « Les étrangers d’Europe présents sont tombés amoureux du projet et de la langue française, et parlent tous très bien le français ».
[caption id="attachment_11732" align="alignleft" width="300"] Les participants de la SPECQUE 2015[/caption] « Vecteur de confiance en soi. »Pour Rose Saint-Pierre, jeune Québécoise étudiante en communication et politique à l’UQAM, la SPECQUE lui a permis de mieux comprendre l’Union européenne, autant au niveau de son fonctionnement que des enjeux et des débats qui l’animent. « Je faisais partie d’un groupe politique euro-sceptique (ELDD), j’ai donc abondamment creusé le filon du scepticisme européen, explique-t-elle. Ce sont les jeunes Européens qui devront apporter des réponses à ce cynisme, mais aussi aux débats identitaires, aux crises économiques, aux migrants. »
L’UQAM a d’ailleurs remporté le prix de la Meilleure Délégation à l’ouest de l’Atlantique et Rose a remporté le prix de Meilleure Recrue 2015. « Ce ne sont pas des prix attribués par un jury, mais par les participants eux-mêmes. Il faut donc se démarquer et se faire connaître en plénière, en commission et en négociations de couloirs », souligne-t-elle.
Pour ces trois jeunes personnes qui n’étudient pas du tout en droit, cela leur a apporté beaucoup de connaissances et ils se sentent maintenant davantage en confiance. « Au départ je me sentais imposteur, car je n’étudiais pas en droit, lance Rose, et finalement ça s’est très bien passé. Bien sûr, nous acquérons beaucoup d’aptitudes en art oratoire, mais aussi en négociations de couloirs où nous apprenons à nous imposer comme leaders. » Ceci est également sans compter la présence de journalistes qui participent aussi à la SPECQUE : « Journaux télévisés, journaux et conférences de presse font partie du quotidien, il faut donc apprendre à gérer avec les médias », ajoute-t-elle.
(Crédit photo : SPECQUE)
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