Tout quitter en France pour partir traverser le Canada en vélo ? C’est le choix qu’a fait Sandrine Laporal, en mai dernier. L’Outarde libérée l’a rencontrée à Montréal après ses 8 000 kilomètres effectués dans ce si vaste pays.
Par Charlotte Lopez
C’est muni d’un visa de touriste qu’une jeune femme originaire de Saint-Nazaire et vivant à Nantes, Sandrine Laporal, a décidé de quitter travail et appartement pour vivre son rêve à vélo. C’est un projet qu’elle ne pensait jamais faire un jour, mais qu’elle a découvert en visitant des blogs de voyageurs sur internet.
« Ça fait très longtemps que je souhaite vivre une expérience canadienne, explique-t-elle. Ce n’est pas facile de tout quitter comme ça et de partir à l’aventure, mais cette fois-ci je me sentais prête. »
« Le voyage à vélo est une école de la vie »
Sandrine n’est pas une passionnée de vélo et fait du sport seulement de temps en temps. En contactant un couple de Français qui avait déjà fait cette même traversée du Canada à vélo, elle a découvert qu’ils ne faisaient pas du tout de sport et ne s’étaient pas préparés avant leur grand départ. « Je me suis dit que s’ils y étaient très bien arrivés, alors pourquoi pas moi ? », lance-t-elle.
C’est donc armée d’un vélo basique sur lequel elle a rajouté des équipements, pour qu’il soit confortable et résistant, qu’elle s’est envolée vers Vancouver le 8 mai dernier. Pendant son trajet de cinq mois, elle n’a pas eu un seul problème mécanique, ni même une seule crevaison. « Je ne connaissais rien à la mécanique avant mon voyage, souligne l’aventurière, mais comme je voulais être indépendante sur la route, je suis allée dans un atelier de vélo à Nantes pour observer un peu et connaître au moins les bases avant de partir. »
Sandrine a fait du camping pendant pratiquement toute la durée de son séjour et avait donc ses bagages sur son vélo, à l’avant et à l’arrière. Selon les régions – où elle a pu plus ou moins s’approvisionner – le poids variait entre 29 et 33 kg. Elle a donc dû beaucoup travailler sur l’équilibre des poids afin que les descentes ne soient pas trop dangereuses : « Quand on descend à 55km/heure ça tient, mais par contre, il ne faut pas bouger et être très vigilant. »
« Partir était une évidence, le plus dur était de franchir le pas »
En préparant son voyage un an à l’avance, elle a pu chercher ardemment du financement et des partenariats afin de faire baisser le coût d’un tel voyage. Mais c’est tout de même plus de 8000€ qu’elle a dû investir, comme on peut le lire sur son blog My Happy Canada Tour. « J’y suis allée au culot et j’ai cherché de l’aide un peu partout pour mes vêtements, pour l’équipement du vélo et du camping, confie Sandrine. Ma plus grande surprise est d’avoir eu mes billets d’avion offert par Air Transat, alors que je ne demandais qu’une simple remise. »
La jeune femme a ainsi pu voir les merveilles du Canada, et six de ses dix provinces. Partie de France la peur au ventre, elle était aussi très excitée, et a finalement vécu un voyage fantastique. « Je m’étais tellement préparée psychologiquement à ce que ce soit dur, que j’allai craquer, et sûrement vouloir rentrer, qu’en fait ça n’est jamais arrivé », raconte Sandrine. « En fin de compte, j’ai trouvé ça beaucoup plus facile que ce que j’imaginais, parce que j’ai tellement fait de rencontres extraordinaires, j’ai tellement eu des petits anges bienveillants qui ont veillé sur moi tout au long de la route. »
La jeune femme a en effet provoqué des rencontres. Pour elle, son voyage à vélo ne se résumait pas seulement à visiter un pays, mais aussi à ce que ce soit une aventure humaine. « Le Canada est tellement riche culturellement, c’était un bonheur de rencontrer plein de personnes différentes », lance-t-elle. « J’allai souvent chez les gens demander si je pouvais planter ma tente dans leur jardin, je n’ai eu pratiquement aucun refus. J’ai fait de très belles rencontres. »
Le nord de l’Ontario, la région la plus difficile de son voyage
En termes de chaleur humaine et de difficultés des routes, le nord de l’Ontario a été pour elle la région la plus éprouvante. « La route qui contourne le nord du lac Supérieur est une route terriblement dangereuse quand on est cycliste, se remémore Sandrine. Il n’y a pas d’accotement, les routes ne sont pas en bon état ; le soir j’étais juste contente d’être en vie, car c’était vraiment très dur. »
Sur les routes du Canada, elle a dû trouver sa place entre les camions, les voitures et autres camping-car : « Les premiers jours sont difficiles, mais après on s’habitue, il faut faire attention c’est tout. Finalement les camions sont ceux qui font le plus attention aux cyclistes. »
« Ce voyage a donné un tout nouveau sens à ma vie »
Cette découverte du Canada à vélo et le fait d’avoir été si proche de la nature a changé la personne que Sandrine était avant de partir : « Je ne pensais pas que ce voyage allait me révéler autant, c’est une vraie quête personnelle. J’ai pris confiance en moi, et je pense que je vais donner un sens différent à ma vie en rentrant en France. »
Les rencontres et les expériences qu’elle a vécues lui ont fait comprendre qu’elle avait envie de revenir plus à l’essentiel, notamment concernant la terre, l’alimentation, et le travail de l’agriculture. « J’ai passé les quinze derniers jours de mon voyage à travailler dans une pourvoirie dans les Laurentides, en échange d’un toit où dormir ; quand on est dans le bois comme ça, ou bien à vélo à travers le Canada, on ne se crée pas de besoins inutiles », souligne Sandrine, qui ne voulait pas manquer la beauté de l’automne québécois, avant de prendre son vol de retour, le 19 octobre.
Un livre sur son expérience canadienne
Les Laurentides ont d’ailleurs été un endroit où Sandrine a commencé à écrire un livre sur son voyage. « C’était important pour moi de commencer l’écriture du livre tant que j’étais ici, mentionne-t-elle. Il sera surtout axé sur mes rencontres avec les gens, ces petits anges qui ont veillé sur moi durant tout mon périple. » Pour elle, ce livre est surtout un hommage à toutes ces personnes qui ont pu l’aider pendant ces cinq mois : « J’estime maintenant que j’ai une famille au Canada ».
La jeune femme ne se voit plus voyager sans son vélo et compte bien multiplier les voyages. Elle affirme avoir eu une très belle histoire d’amour avec le Canada et le Québec. « En France, on est dans un contexte où rien ne va, et moi, plus c’est morose plus je me dis qu’il faut encore rêver. J’ai envie de croire qu’on en a encore le droit. Donc, croyez en vos rêves et faites tout pour arriver à les réaliser. »
(Crédit photo : Sandrine Laporal)]]>