Après des études à l’école des beaux-arts à Paris, spécialisé en restauration de bâtiments à valeur patrimoniale, Stéphanie Alberola monte son cabinet d’architecte et poursuit son métier en tant qu’indépendante, jusqu’en 2012 où elle décide de traverser l’atlantique, avec son mari et leurs trois enfants. Nous avons fait sa rencontre en une matinée pluvieuse, autour d’un bon café chaud, afin de discuter des différences entre la France et le Québec en termes d’architecture et d’en savoir plus sur ses futurs projets.
Entrevue recueillie par Léa Villalba
Léa : « Alors, Stéphanie, dis-nous tout. Comment s’est passée la transition entre la France et le Québec ? Quelles démarches as-tu du faire afin de pouvoir exercer ton métier ici ?
Stéphanie : En arrivant au Québec, j’ai passé l’examen avec succès à l’Ordre des Architectes du Québec (OAQ), puis, pendant plus de quatre ans j’ai travaillé dans des firmes d’architectes québécoises. Après avoir fait mes preuves, je me suis lancée et j’ai ouvert une firme à Outremont où j’ai eu mes premiers clients privés. Petit à petit, les projets ont grandi. Maintenant, je travaille aussi bien sur des projets de restauration que sur des projets de constructions neuves. Ça fera un an en janvier que ma société existe et je te dirai que c’est bien parti !
Léa : Quel accueil t’a réservé Montréal ?
Stéphanie : L’accueil a été extrêmement positif à Montréal, au Québec. L’architecture est une profession appréciée. Beaucoup de projets se développe et comme il y a un besoin d’architectes il y a donc un respect et une écoute. De plus, je suis depuis un an le programme de mentorat de l’OAQ. Mon mentor, un architecte québécois m’accompagne et me guide dans le développement de ma structure. Très efficace, quand on démarre!
Léa : Quelles différences as-tu pu constater entre l’architecture en France et celle du Québec ?
Stéphanie : Montréal est une ville « mixte ». Elle a, à la fois, un centre très moderne, en pleine expansion, et à la fois une histoire, un passé que l’on découvre dans le Vieux-Montréal entre autres. Montréal est une ville dynamique et qui depuis quelques années porte un réel intérêt sur le patrimoine urbain et architectural aussi bien de la part des élus que des investisseurs. Mon expertise en restauration et en mise en valeur du patrimoine bâti est un atout ici.
Léa : Le système d’artisanat dans la restauration est-il le même qu’en France ?
Stéphanie : Non. Ce n’est pas comme en France où la plupart des professionnels sont des artisans. C’est culturel, il me semble. En France, dans la restauration, on ne travaille qu’avec des artisans. Ici, cela commence à se développer et je pense que dans les années à venir, cela peut être prometteur. Je suis arrivée au bon moment, je crois !
Léa : et en ce qui concerne l’administration en tant que telle ? Comment ça marche ?
Stéphanie : Ici, quand on commence un projet, cela va vite. Il n’y a pas de longues procédures comme une validation de permis de construire qui pourraient durer des mois, comme en France. En plus, on peut le refaire. Ici, non. Donc une fois le permis obtenu, il faut y aller !
Léa : est-ce que tu penses que le système est meilleur?
Stéphanie : En ce qui concerne la restauration, il y a différents niveaux de validation en France : Architectes bâtiment de France, architectes des monuments historiques, comités consultatifs, etc.. Quand j’ai restauré des clochers d’églises ou fait des vitraux, ça passe par beaucoup de gens (archéologues, historiens …) avant de commencer le chantier. Ça prend au moins six mois pour que tout le monde soit d’accord. Ici, c’est très pragmatique. Si l’édifice a un intérêt historique, fonctionnel, on le conserve. Si on considère qu’il n’a aucun intérêt, on le démolit.
En France, pour faire des travaux de restauration, le financement provient à plus de 50% de l’État. Ici, au Québec, il y a des financements via le provincial et le fédéral, mais aussi par les associations communautaires, qui ont un rôle très important.
Léa : y a-t-il des avancés en termes d’énergies renouvelables à Montréal ?
Stéphanie : j’ai réalisé beaucoup de toits végétaux depuis mon arrivée à Montréal pour des édifices publics. C’est très à la mode actuellement. Les îlots de chaleur sont très fréquents et à régler à Montréal. Nous, architectes, on doit contribuer en cherchant des solutions écologiques, mais toute la difficulté est de construire avec des matériaux innovants sans détériorer ni changer le style architectural de l’édifice. Le toit vert est un bon compromis, mais il n’y a pas que cela…
Léa : Comment ?
Stéphanie : Par exemple, à chaque démarrage de projets, j’essaye d’utiliser des produits à performance écologiques et locaux. C’est une réflexion à avoir avant le démarrage de tout projet. Je propose des toits verts, des structures de murs ou des planchers tout en bois. Dépendant du projet et du client. C’est très important même lorsqu’il s’agit de rénovation, restauration ou construction neuve. Notre rôle est de conseiller avant tout démarrage de projet.
Léa : et en termes de coûts ?
Stéphanie : Il faut penser que ces solutions sont chères au départ, mais rentables à long terme. De plus, des aides gouvernementales pour des rénovations majeures apparaissent au Québec, c’est très prometteur. Il faut bien se renseigner.
Léa : Quel est l’avenir pour la préservation du patrimoine bâti pour la ville de Montréal ?
Stéphanie : La ville a lancé un plan d’action du patrimoine 2017-2022, afin que Montréal soit un lieu de vie de qualité en misant sur son patrimoine matériel et immatériel. L’architecture et la mise en valeur du cadre bâti en font partie. Dans 10 ans, Montréal sera très attractive . Paris, c’est figé. Ici, c’est en devenir.
Léa : Et quels sont vos projets pour le futur ?
Stéphanie : En ce moment, je travaille sur un grand projet de chalets (17) à Saint-Jean de Matha au sein du site de l’auberge de la montagne coupée et parallèlement je poursuis plusieurs projets de restauration à Westmount et Outremont.
Je suis passionnée par mon métier à tous les niveaux : analyse, création, chantier. Quel que soit le sujet, le type de client ou de la complexité de la commande, je suis curieuse et j’adore apprendre. Créer, au Québec, en Amérique du Nord et partager mon savoir est un challenge que j’essaye de réaliser!
Site internet : http://www.sa-architects.ca
SVP pourriez-vous expliquer aux architectes du Québec qu’il n’est pas utile de mettre les WC avec acces direct dans le salon , et faire des WC pour visiteurs … Merci