Les propos choquants de l’acteur français tenus lors d’un voyage en Corée du Nord et diffusés lors de l’émission « Complément d’enquête » le 7 décembre , n’en finissent pas de défrayer la chronique. De chaque côté de l’Atlantique, la lecture des propos grossiers et sexistes n’est pas la même.
« La Légion d’honneur est un ordre qui n’est pas là pour faire la morale. Ce n’est pas sur la base d’un reportage qu’on enlève la Légion d’honneur à un artiste », a justifié le président de la République, Emmanuel Macron, lors d’une entrevue sur France 5 le 20 décembre (C à vous).
Pourtant, au lendemain de la diffusion de « Complément d’enquête: La chute de l’ogre », la ministre de la Culture française, Rima Abdul Malak, avait évoqué la possibilité d’un retrait de la Légion d’honneur à l’artiste en affirmant qu’il faisait « honte » à la France. Le président Macron a balayé cette éventualité d’un revers de main: « Elle s’est trop avancée ».
Invité de France-Inter, l’ancien président de la République, François Hollande, est entré dans l’arène, fustigeant Emmanuel Macron: « Moi je vais vous parler des femmes agressées, de la violence, la domination, le mépris. C’est ce qui était attendu du président. Non nous ne sommes pas fiers de Gérard Depardieu, quand regardant une jeune fille de 12 ans faisant cheval, il la sexualise. » a expliqué François Hollande.
Au Québec, l’unanimité est plutôt de mise et la décision rapide. Le 13 décembre, soit moins d’une semaine après la diffusion du reportage, le Premier ministre, François Legault, a annoncé par voie de communiqué qu’il procédait, sous la recommandation du Conseil de l’Ordre national du Québec, à la radiation de l’acteur français Gérard Depardieu, nommé chevalier de l’Ordre en 2002 par Bernard Landry.
« Les propos scandaleux tenus par Gérard Depardieu devant les caméras ont choqué le public international, avec raison. Son comportement entache la réputation des membres de l’Ordre national du Québec. J’ai donc pris la décision d’ordonner sa radiation de l’Ordre, effective immédiatement. »
François Legault, Premier ministre du Québec
Le communiqué poursuit: Les propos choquants tenus par M. Depardieu, captés par vidéo et circulant dans les derniers jours, démontrent sans équivoque un comportement allant à l’encontre des valeurs de l’Ordre national, dont la devise est « Honneur au peuple du Québec ». Le Conseil de l’Ordre a donc recommandé au premier ministre de radier M. Depardieu de l’Ordre, ce qui signifie qu’il perd son titre de chevalier. C’est donc à l’unanimité des membres présents, devant des preuves évidentes de comportement allant à l’encontre des valeurs de l’Ordre et du Québec, que le Conseil s’est prononcé en faveur d’une radiation de M. Depardieu, une première dans l’histoire de l’Ordre.
« Depardieu était un monstre sacré du cinéma. Il est de plus en plus un monstre. Et de moins en moins sacré. », s’insurge Sophie Durocher dans une chronique dans le Journal de Montréal le 10 décembre.
« Mais ce qui me chagrine le plus, c’est l’apparente impunité avec laquelle on laisse des hommes devenir des ogres. Comment se fait-il qu’on laisse cette odieuse mutation s’opérer sans broncher ? » s’interroge Salomé Corbo dans Le Devoir le 19 décembre.
Alors qu’en France la polémique enfle entre les « pro Depardieu » qui pardonnent au monstre sacré du cinéma français, et les autres, et surtout les femmes qui osent enfin parler, au Québec, on ne badine pas avec ces propos dégradants; l’affaire est classée et Depardieu déchu de sa superbe. Deux lectures différentes.
Voir le documentaire de France 2 sur Tou.tv: https://ici.tou.tv/gerard-depardieu-la-chute-de-l-ogre