Lundi, la 37e édition du Salon du livre de Montréal s’est achevée après six jours d’effervescence. La francophonie était à l’honneur et le thème « Montréal, francosphère du livre » a attiré 115 200 visiteurs. Quelques 2 150 auteurs ont accepté l’invitation et près de 1 000 maisons d’édition étaient représentées. Parmi elles, de grandes maisons françaises comme Gallimard, Albin Michel et Bayard, mais aussi Hachette Canada que l’Outarde Libérée a rencontré.
Française établie au Québec depuis 2009, Julie Macherez est aujourd’hui directrice des ressources humaines chez Hachette Canada, une filiale d’Hachette France. Contrairement à la maison-mère, l’antenne québécoise ne fait pas d’édition. Uniquement de la diffusion et de la distribution. Pour l’éditeur français, le marché québécois est un incontournable. Selon les collections, il représente entre 10% et 30% du chiffre d’affaires total d’Hachette chaque année. « Proportionnellement à la France, c’est énorme, puisque la population qui lit en français est plus réduite que dans l’Hexagone », affirme-t-elle.
Le Québec : une place de choix pour les éditeurs français
On pourrait donc penser que le géant Hachette écrase ses concurrents québécois. « Pas du tout ! », assène la jeune bibliophile. Au contraire, Hachette Canada permet la diffusion massive des livres édités par Marchands de feuille et La Courte échelle en organisant la distribution dans toutes les villes du Québec de façon simultanée. L’objectif pour elles : économiser sur les frais de transport. « On leur facilite la vie en les aidant à inonder le marché. S’ils le faisaient tout seuls, il leur faudrait un livreur dans le Nord du Québec, un autre ailleurs et ce serait vraiment compliqué pour eux », explique-t-elle.
Entre le Québec et la France, les goûts littéraires différents
Alors que Québécois et Français lisent dans la même langue, les préférences littéraires varient de part et d’autre de l’Atlantique. Quelques romans comme La fiancée américaine d’Éric Dupont, qui ont connu un succès retentissant au Québec, n’ont pas eu cette chance en France. « Snobé par plusieurs maisons prestigieuses », il a finalement été édité en France par Les Editions du Toucan, ne lui assurant pas le même écho qu’au Québec. Au grand dam de Julie Macherez : « C’est dommage parce que c’est un gros carton ici, et ça aurait peut-être pu fonctionner en France», estime-t-elle.
Plébiscitée par les médias et les lecteurs dans la belle province, la littérature québécoise a du mal à percer en Europe. Le fossé culturel semble trop difficile à surmonter. Si les thèmes abordés par la littérature québécoise n’intéressent pas les Français, « la ‘’gouaille’’, la façon de parler, non plus. Ce sont deux mondes différents : pour le folklore et l’humour, ça va ; pour les livres, ça ne passe pas, ça ne fait pas assez sérieux pour eux », analyse-t-elle. Une exception à la règle, pourtant : l’auteur montréalais Dany Laferrière. Edité d’abord par les Editions du Boréal pour le Québec, puis par Grasset pour la France pour L’Enigme du retour, il a été récompensé par le prix Médicis en 2009 et est élu à l’Académie française l’an dernier.
(crédit visuel : Salon du Livre de Montréal 2014)