Caroline Darian, fille de Gisèle Pelicot, au cœur de l’affaire des viols de Mazan, était de passage à Montréal la semaine dernière, pour présenter son deuxième livre Pour que l’on se souvienne, récit du parcours criminel de son père, Dominique Pélicot, condamné à 20 ans de prison en décembre dernier, aux cotés de 50 coaccusées. Elle a insisté également sur le combat qu’elle mène pour toutes les victimes de soumission chimique dont elle se dit également une victime non reconnue par la justice.
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Invitée dans les médias québécois, Caroline Darian a livré des témoignages bouleversants. De passage à l’émission Tout le Monde en parle, elle a expliqué au micro de Guy A. Lepage: » L’histoire de notre famille a été couverte par les médias du monde entier, mais c’est juste l’arbre qui cache la forêt. Dominique Pelicot, c’est sans doute l’un des prédateurs sexuels les plus importants des 20 ou 30 dernières années en France. »
«Moi qui étais très proche de mon papa, c’est quelque chose qui m’a littéralement foudroyé parce que toutes les fondations, tous ces souvenirs d’enfance, tous ces bons moments qu’on a passés ensemble, je les revisite à la lueur de ce que je viens d’apprendre…», explique Caroline Darian au micro de Patrick Lagacé (Lagacé le matin) le 28 avril 2025.
Dans ce deuxième ouvrage qu’elle vient présenter au Québec, récit à la fois personnel et engagé, elle retrace les crimes de son père, sa propre souffrance, et milite pour la reconnaissance des victimes de soumission chimique. Ce récit fait suite à son premier livre paru en 2022. « Et j’ai cessé de t’appeler Papa« .
Dans son ouvrage, Caroline Darian évoque également sa propre certitude d’avoir été droguée et abusée par son père. En entrevue pour le quotidien Le Devoir, elle explique: « Quand je dis que j’ai été la grande oubliée [du procès pour les viols de Mazan], c’est le sujet de l’inceste qui a été complètement passé sous silence ».
Des images troublantes d’elle, retrouvées sur le disque dur de Dominique Pelicot dans des dossiers aux noms explicites, appuient son ressenti, bien qu’aucune preuve formelle ne permette à ce stade de confirmer ses dires. Elle a déposé plainte, tout comme son neveu Nathan, et attend qu’une enquête soit enfin menée. Mais elle déplore le silence de la justice, et le déni de son propre père, qui se réfugie dans l’amnésie : « Je ne me souviens pas si j’ai pris ces photos ».
Un autre choc pour Caroline Darian réside dans le refus de sa mère, Gisèle Pelicot, de reconnaître sa souffrance. Bien qu’elle admire le courage de cette dernière d’avoir porté plainte contre son ex-mari, elle regrette qu’elle reste sourde à son propre vécu. Une douleur qu’elle qualifie de « mécanisme d’auto-protection » mais aussi d’« abandon de trop ».
Consciente que la majorité des victimes de soumission chimique ne disposent pas de preuves aussi accablantes que celles présentées lors du procès de Mazan, Caroline Darian a fondé en 2023 l’association M’endors pas : stop à la soumission chimique. Elle y mène des actions de sensibilisation et de prévention, afin de mettre en lumière cette forme d’agression trop souvent ignorée.
Aujourd’hui, malgré un « espoir infime » d’obtenir justice pour elle-même, Caroline Darian poursuit son combat, convaincue que briser le silence peut permettre à d’autres de sortir de l’ombre.
Caroline Darian et son combat contre la soumission chimique | Pénélope (Radio-Canada)
(crédit photo de Une: Patrice Normand – JC Lattes)