Lauréat du Prix du Film d’histoire du Festival International du film d’histoire de Pessac en 2017, le film « La douleur » d’Émmanuel Finkiel, prendra l’affiche au Québec le 14 septembre prochain. Scénarisé d’après l’œuvre de Marguerite Duras publiée en 1985, il met principalement en scène Mélanie Thierry, Benoît Magimel et Benjamin Biolay.
Par Pascal Eloy, journaliste culturel
Ce film raconte une histoire autobiographique (bien qu’en partie fictive) de Marguerite, l’épouse de Robert Antelme, figure majeure de la Résistance, arrêté en juin 1944 et probablement déporté. Marguerite (Mélanie Thierry) est, alors, tiraillée par l’angoisse de ne pas avoir de ses nouvelles, par sa liaison secrète avec son camarade Dyonis (Benjamin Biolay) et sa relation ambiguë avec un agent français de la Gestapo, Pierre Rabier (Benoît Magimel).
Emmanuel Finkiel commence sa carrière en 1979, comme assistant-réalisateur, travaillant, avec Jean-Luc Godard, Krzysztof Kieslowski ou Bertrand Tavernier. En 1995, il passe lui-même derrière la caméra et réalise « Madame Jacques sur la Croisette » (César du meilleur court métrage en 1997). En 1999, il réalise son premier long métrage, « Voyages », César du premier film et du meilleur montage en 2000 et en 2009, il réalise son troisième film, « Nulle part, terre promise ».
Ce film… ne parvient pas à rendre la profondeur du texte de Duras
Aujourd’hui, au travers de cette relecture interprétative du livre de Duras, Finkiel veut mettre en évidence que « Pour ces gens qui n’avaient pas de dépouille, l’absence était toujours présente. Et ce n’était pas une idée intellectuelle, c’était très concret. La présence de l’absence… De mon point de vue, c’était ce que racontait La douleur : être face à cette présence. Replié sur soi-même, un voyage intérieur. ». Et, en fait, cela donne un film longuement linéaire avec un étonnant mélange de scènes filmées et de narration qui, cependant, ne parvient pas à rendre la profondeur du texte de Duras. Car, il convient de ne pas oublier qu’à travers son parcours personnel, Duras raconte une odyssée collective, une histoire hautement française, de Français entre Français. De nos jours, l’époque change, bien-sûr, mais le drapeau tricolore ne cesse d’être là ; le discours change mais les gens restent les mêmes, même si, en quelque mois, leur avis peut basculer et se retrouver à l’opposé de sa situation initiale. Or, on ne le sent pas vraiment dans le film.
De plus, comme le dit encore le réalisateur, « Avec ce film, je me suis vraiment autorisé à sonder toutes les compétences de l’objectif. Au tournage, un technicien avait une importance peut-être encore plus grande que sur les autres films : l’assistant opérateur. D’habitude, il n’est pas question qu’un plan soit flou mais là, on était dans un autre code. Tous les flous étaient les bienvenus… ».
Et bien, en fait, ces nombreux plans flous contribuent à créer une atmosphère quasi intemporelle où j’ai ressenti beaucoup de difficultés pour m’imaginer à Paris en 1944. Ajoutez à cela une bande sonore cacophonique et stridente et vous comprendrez aisément que je ne sois pas parvenu à entrer dans le film pour me laisser aller au fil de l’histoire et de la réalisation. Bref, probablement un film intéressant, mais à réserver aux spécialistes et aux passionnés de Duras…
En salle au Québec le 14 septembre 2018: Montréal (Quartier latin et Beaubien), Québec (Le Clap), Trois-Rivières (Le Tapis rouge).
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